Le poivre des cimes ou Mat-Khen, est un cousin sauvage du poivre de Sichuan, du Timut ou du poivre Sansho, dont on consomme seulement l’enveloppe, débarrassée de ses graines.
Originaire du nord du Vietnam, plus exactement de la région de Lai Chau, où il pousse au-dessus de deux mille mètres, il est soigneusement ramassé à la main par les autochtones, et doit son nom au fait qu’il se récolte comme son nom l’indique à la cime d’arbres poussant en altitude, à la frontière du Laos et de la Chine.
Son premier nez est très agréable, marqué par des notes vives d’agrumes, de clémentine corse, d’eucalyptus avec des pointes anisées et mentholées.
Ensuite se succèdent des notes plus chaudes, sucrées, gourmandes, de cédrat confit et d’angélique.
Une fois en bouche, ces baies développent un piquant bref et délicat, suivi d’une agréable amertume, qui s’estompe rapidement pour laisser place à une finale persistante avec des notes d’agrumes très marquées.
La fin de bouche est accompagnée d’une légère sensation anesthésiante, moins puissante que celle de son cousin, le poivre de Sichuan.
C’est un « poivre » subtil, délicat et riche en arômes. Il se marie à merveille avec les poissons, crustacés, volailles ou encore avec certains légumes tels que les endives ou encore le chou-fleur. En fin de repas son usage est bienvenu dans les salades de fruits et les desserts à base de chocolat blanc ou d’agrume..
Il est conseillé de torréfier les baies à la poêle, sans matière grasse, durant deux à trois minutes pour en accentuer toutes les saveurs.
Le chef de Gastronhoming, François Marchenay, découvrit ce produit d’une grande finesse lors de son dernier voyage dans le Nord du Vietnam, à Sapa, où il a pu déguster des mets tous plus fins les uns que les autres. A son retour, pour sa carte d’hiver, il décida de réaliser deux assiettes construites autour de ce goût puissant et délicat.
La première recette est réalisée autour d’une langoustine servie crue, marinée au poivre des cimes, à l’huile d’olive et au citron vert, disposée sur un lit de crème de chou-fleur lisse et onctueuse, surmonté de quelques copeaux de légumes et pousses de saison comme la betterave chioggia, le radis red meat, l’oseille sauvage ou le mouron des oiseaux.
Une recette légère et délicate mariant le côté iodé de la langoustine à la légère amertume terrienne du chou-fleur, le tout relevé par la fraîcheur intense de cette baie.
La deuxième recette est construite autour d’oranges sanguines pelées à vif, dont le jus, agrémenté d’un peu de sucre et de vanille, est additionné de quelques baies de poivre des cimes concassées, appuyant nettement le gout subtil des oranges sanguines.
Cette nage d’agrumes est servie avec une tuile croustillante au thé matcha, apportant un jeu très intéressant de texture, et une quenelle de sorbet au citron parfumé au basilic, amenant là encore une fraîcheur très agréable qui donne sa touche finale au dessert.
Le chef tient à terminer ses menus par des desserts légers et fruités.
Le poivre des cimes convient parfaitement à ce type de recette.